M-6 AVANT MARSEILLE-CASSIS - GÉRER PSYCHOLOGIQUEMENT SA COURSE
Recommandations proposées par Nicolas Mascret, Maître de conférences
Institut des Sciences du Mouvement – Aix-Marseille Université / CNRS
Comment bien se préparer mentalement à quelques mois de la course ?
Il vous reste six mois avant de débuter Marseille-Cassis. Comment se motiver et rester motivé(e) dans cette période à la fois très longue et très courte ? Commençons par l’erreur principale à éviter : se fixer un objectif uniquement pour le jour de la course. En effet, le risque de se fixer un seul objectif à si long terme est de se dire qu’on a largement le temps de l’atteindre, et donc qu’on peut sans problème remettre son entraînement à plus tard. Et à force de reporter et de reporter ses entraînements en se disant qu’on a le temps, on prend le risque de ne pas arriver prêt(e) le jour de la course. C’est la fameuse procrastination, un terme scientifique que l’on peut définir par le slogan « Je le ferai demain ».
Pour éviter cet écueil assez classique que l’on rencontre dans le sport, mais aussi dans son travail ou dans sa vie quotidienne, il peut être intéressant de s’interroger sur la meilleure façon de définir ses objectifs, en s’appuyant sur une théorie de la motivation que l’on nomme la théorie de fixation de but.
Pour qu’un but puisse avoir les meilleures chances de se réaliser et pour entretenir la motivation, ce but doit avoir quelques caractéristiques :
- La proximité et la temporalité du but
Un but final trop long à atteindre (par exemple faire un certain chrono le jour de Marseille-Cassis ou terminer la course) peut être décomposé en une série de sous-buts successifs. Ces sous-buts peuvent être de différentes natures et s’envisager à des échéances temporelles différentes, par exemple participer à une course de préparation (but à long terme), réussir à faire deux entraînements par semaine pendant un mois (but à moyen terme), réussir à réaliser une séance d’entraînement telle qu’elle a été planifiée (but à court terme), tenir une allure pendant quelques minutes lors d’un entraînement
(but à très court terme). Se fixer des buts fréquents à court terme est un bon moyen de conserver de la motivation pendant une phase de préparation qui peut parfois être longue ; - La spécificité du but
Quelle que soit sa temporalité, plus un but est spécifique, clair, identifiable, meilleure est la performance. Éviter les formulations vagues du style (« Aujourd’hui je veux faire une bonne séance ») au profit de formulations plus précises et concrètes (« Aujourd’hui je veux réussir à tenir à 12 km/h sur la séance de fractionné en 30/30 ») est une façon de se motiver grâce à un but concret, mais aussi une façon d’augmenter la probabilité d’atteindre son but car on sait précisément quel est le but à atteindre ; - La difficulté et le réalisme du but
Plus le but que l’on se fixe est difficile, meilleure est la performance. En effet, un but qui semble trop facilement atteignable n’invite pas à se motiver pour s’entraîner, en se disant qu’on y arrivera quoiqu’il arrive. D’où l’intérêt de se fixer un but exigeant. Toutefois, cela reste vrai jusqu’à un certain niveau de difficulté. À force d’augmenter la difficulté, on peut se dire que le but n’est finalement pas faisable : dans ce cas, la motivation et la performance ne baissent pas, elles s’effondrent, victimes du « De toutes façons je n’y arriverai jamais, c’est trop dur ». C’est pourquoi même si les buts que l’on se fixe doivent être exigeants, ils doivent simultanément être réalistes, c’est-à-dire adaptés au niveau de chaque coureuse et de chaque coureur ; - La positivité du but
Développer et entretenir sa motivation passe souvent par la formulation de buts de façon positive et non de façon négative, en identifiant ce qu’il faut faire (par exemple « Réussir à maintenir son allure jusqu’au prochain virage ») plutôt que ce qu’il ne faut pas faire (par exemple « Ne pas s’arrêter jusqu’au prochain virage »). Ainsi, votre motivation se centrera plutôt sur la recherche du succès que sur l’évitement de l’échec, ce qui est bien plus profitable aussi bien du point de vue de la motivation en elle-même que de la performance ; - La flexibilité du but
L’entraînement n’est jamais un long fleuve tranquille et vouloir à tout prix atteindre certains buts, alors que des éléments se mettent en travers de votre chemin (vous êtes fatigué(e), vous avez eu une grosse journée de boulot…) peut être contre-productif pour votre motivation et pour votre performance. De la même manière, conserver certains buts alors que vous vous sentez très facilement capable de les atteindre est également contre-productif.
Ainsi, donner à vos buts de la flexibilité, en vous octroyant la possibilité de monter ou de descendre la difficulté de certains buts, est une stratégie qui vous permettra de mieux vous adapter aux circonstances positives ou négatives du moment.
Apprendre à se fixer des buts participe activement à la réussite de votre processus d’entraînement, à la fois du point de vue psychologique grâce au développement et à l’entretien de la motivation et du point de vue de la performance en vous permettant de réaliser des entraînements avec plus de sérieux et de suivi, mais aussi avec plus de fierté de réussir à atteindre les buts que vous vous êtes fixés. A vous de jouer désormais : droit au(x) but(s) !